Jean-Marc Barr
Homme libre
En septembre dernier, l’acteur réalisateur franco-américain Jean-Marc Barr a posé ses valises quelques jours à Toulon. Le plongeur mythique du film Le Grand Bleu a retrouvé la Méditerranée lors d’un concert subaquatique organisé pour les 10 ans du Théâtre Liberté*. L’occasion d’engager la conversation avec un homme libre.
© Clément Minair
© Clément Minair
C’est dans une crique, en immersion dans l’eau, que Jean-Marc Barr et le compositeur Michel Redolfi invitent le public à participer à S.O.S (Sea Of Sound), un concert subaquatique. À travers la poésie lue par Jean-Marc et la musique de Michel diffusée sous la surface, le duo se propose de réveiller les émotions. De réveiller un corps qui entrera en résonnance avec les sons. L’eau devient alors un espace culturel et les spectateurs sont acteurs de ce moment. « Un moment unique » ayant une dimension à la fois personnelle et collective, presque spirituelle. « Par cette expérience physique, on souhaite déclencher une prise de conscience sur la nécessité de préserver la mer et les océans. » explique Jean-Marc avec beaucoup de conviction.
Ce réveil, il l’a vécu à travers Le Grand Bleu. L’apnée pratiquée à ce niveau équivaut à flirter avec le danger. « C’est entretenir un rapport sensuel avec la mort » confie Jean-Marc. « Quand tu plonges à 20-30 mètres, tu vois combien tu es insignifiant. » S’il ne se considère pas comme militant, Jean-Marc est fier de ce spectacle qui est bien plus qu’un divertissement. Selon lui, s’il existe une solution (il n’en est pas convaincu) c’est par l’esprit et l’émotion qu’elle émergera. Mais il se garde bien d’incarner une cause comme le font certains acteurs hollywoodiens. « En tant que clown, je ne me trouve pas crédible. Cela ne m’empêche pas de dire des vérités, comme un clown shakespearien le ferait ». Des vérités qu’il se permet de dépeindre grâce à la liberté qu’il s’est octroyée.
« On ne m’a pas acheté, ma parole n’engage que ma responsabilité »
Le choix de tracer son propre chemin et d’être maître de son destin, il l’a fait en quittant les États-Unis et l’American way of life pour étudier à Paris au début des années 1980. Après l’immense succès du Grand Bleu, Jean-Marc Barr confirme son désir d’indépendance et s’éloigne du Star System. « Mon parcours est à l’opposé de Jean-Claude Van Damme qui a débarqué de Belgique pour faire une carrière Hollywoodienne. » Sa rencontre avec Lars Von Trier va marquer sa jeune carrière, il tournera sept films avec le réalisateur. En 1999, Jean-Marc réalisera Lovers, son premier long-métrage, suivant les principes du Dogme95, ce mouvement prônant un retour à une sobriété formelle, en prise directe avec le réel. « Vu du business world, je suis un marginal » poursuit-il.
© Clément Minair
Pourtant, Jean-Marc a grandi aux États-Unis auprès d’un père américain, colonel dans l’US Air Force, et d’une mère française, alors infirmière. De cette vie sur des bases américaines, il a hérité d’une vision politique se résumant à la propagande américaine, avant de flirter avec une autre culture à Paris. « Je suis un pur produit du XX ème siècle» avoue-t-il. Pourtant il ne cesse de décrier le système militaro-capitaliste qui l’a enfanté.
Jean-Marc a failli être prêtre et même embrasser une carrière de « fighter pilot » dans l’armée Américaine. Il a préféré étudier à la Sorbonne. Il aurait pu également être un acteur bankable mais il a choisi de s’épanouir dans le cinéma indépendant. Il ne se trouve pas crédible en tant que militant, et pourtant, son parcours est une forme d’engagement. Il se décrit comme idéaliste mais se dit résigné face à la catastrophe écologique que l’on voit tous arriver. Jean-Marc fait preuve d’honnêteté : « J’ai toujours suivi ce que mon cœur me dictait ». Peut-être est-ce la raison de son extrême lucidité. On ne voit bien qu’avec le cœur à ce qu’il paraît.
* Châteauvallon- Liberté, scène nationale de Toulon, dirigée par Charles Berling.
Jean-Marc Barr a été révélé au grand public en 1988 grâce à son rôle dans le film culte Le Grand Bleu de Luc Besson. Faisant le choix du cinéma indépendant il tournera sept films avec le réalisateur Lars Von Trier dont Europa, Breaking the waves et Nymphomaniac. En tant qu’acteur il a tourné dans plus d’une cinquantaine de films au cinéma et plus d’une vingtaine pour la télévision. Il a également réalisé et produit plusieurs longs-métrages dont le premier Lovers, suivant les principes du Dogme95. Jean-Marc Barr a joué au théâtre et réalisé des expositions photographiques. En 2018, il rencontre le compositeur Michel Redolfi et se lance dans le projet des concerts subaquatiques.
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